Gravitant à une distance deux fois plus grande du Soleil que Jupiter, Saturne est la dernière planète aisément visible depuis la Terre mais ses conditions d’éclairement sont relativement peu variées du fait de cet éloignement.
Cependant, la forte inclinaison de l’écliptique présente des aspects différents de la surface planétaire d’une année sur l’autre et malgré la faiblesse de la luminosité du petit diamètre apparent de Saturne, des observateurs, disposant de bonnes conditions d’observation -grand instrument et atmosphère transparente pour de bonnes images- peuvent en étudier les détails

De 1922 à 1928, Lyot amorce l’étude polarimètrique de Saturne durant une période peu favorable à l’observation. Contre toute attente, les images sont assez bonnes, notamment celles de 1925 sur lesquelles Bernard Lyot pourra appliquer un fort grossissement en vue d’étudier l’anneau.
A l’instar de Jupiter, la polarisation des bords de Saturne est anormale ; de ce fait Bernard Lyot évince l’étude de la polarisation moyenne du disque pour se concentrer sur la zone centrale –située vers l’équateur et étendue sur le quart de la surface du disque. Il y remarque de faibles variations, assez irrégulières. Toutefois, il ne note aucune différence entre la zone claire équatoriale et la zone sombre tropicale.
Les calottes polaires australes et boréales présentent des phénomènes analogues à ceux de Jupiter ; les intensités et les étendues de ces phénomènes sont très variables -ils s’étendent parfois au-delà de la calotte grise-, mais Bernard Lyot remarque qu’elles évoluent parallèlement.
Toutefois, à l’inverse de Jupiter, ces phénomènes polaires semblent évoluer de manière semblable aux pôles austral et boréal. Lorsque Lyot commence à étudier les anneaux de Saturne, il révèle un plan de polarisation global perpendiculaire au plan de vision mais la mesure du taux de polarisation n’est pas possible ; remarquant que l’anneau intérieur semble plus polarisé que l’anneau extérieur il entreprend des études plus approfondies sur chacun des anneaux-en mai et juin 1925 et 1926, ainsi que de mai à septembre 1927-.
L’anneau intérieur est étudié en 1925 et en 1927; sa largeur et sa brillance le rendent facilement observable ce qui permet à Lyot d’établir que le plan de polarisation -normal au plan passant pas le soleil- et le taux de polarisation –dépendant de l’angle de vision- sont similaires sur les deux côtés.
Les observations de l’anneau extérieur, plus étroit, sont quant-à-elles gênées par la brillance de l’anneau intérieur.

Quoique ces mesures, très difficiles et souvent très imprécises, soient délicates à interpréter, il met en évidence des différences notoires entre les deux anses. A l’inverse de l’anneau intérieur, les plans de polarisation y sont obliques et dissymétriques, de plus les proportions de lumière polarisée sont irrégulières. Néanmoins Lyot discerne tout de même une constante : la polarisation y est toujours plus forte à l’Est qu’à l’Ouest.