Jupiter, trés éloignée du Soleil, a des phases relativement limitées -on ne note qu’une légère ombre sur l’un des bords à la phase la plus importante-. De ce fait, elle semble toujours éclairée de face, et grâce à son très grand diamètre apparent, de modestes instruments suffisent pour l'observer -y compris dans les détails-.
Cependant, son axe de rotation qui est quasi-normal au plan de l’écliptique impose des observations des pôles selon des angles de visions excessivement obliques ; ainsi seul le pôle austral très légèrement incliné vers la Terre -lors de ses passages à proximité- autorise une étude locale.
Bernard Lyot effectue ses premières observations de Jupiter en mai et juin 1922 à la lunette de 175mm de Meudon. En mai, juin, juillet et aout 1923 et 1924, la réparation de la coupole de Meudon lui impose de réaliser ses nouvelles mesures à l’équatorial de 83cm. Il remarque que la polarisation de Jupiter n’est pas uniforme et décide d'étudier indépendamment la polarisation le long de la zone centrale, au centre du disque apparent et aux pôles ; les mesures indiquent que ces zones semblent obéir à des lois de polarisation très différentes.
La zone centrale -située à partir de 35-40° de latitude- n’est pas uniforme. Au cours de ses nombreuses observations, Bernard Lyot remarque que l’Ouest est toujours légèrement plus polarisé que l’Est ; il interprète ceci comme la marque de l’influence du Soleil sur l’atmosphère de Jupiter.
Etonnamment cette bande centrale présente autour du centre du disque une polarisation assez uniforme dont les variations régulières ne sont fonctions que de l’angle de phase.
Cette « anomalie » s’explique par la présence d’une couche de nuages recouverts par une atmosphère épaisse.
Les pôles présentent une polarisation très différente: plus forte au sud qu’au nord, elle décroit depuis les pôles vers le centre du disque indépendamment de l’éclairement. Leur plan de polarisation, tout à fait particulier, est fixe dans le temps mais n’est pas le même en chaque point : perpendiculaire au méridien à son voisinage, il s’en détourne lorsqu’il s’en éloigne de manière à être parallèle au bord le plus voisin de la planète. En 1924, Bernard Lyot explique que ce phénomène résulte de l’orientation spéciale de cristaux en suspension dans son atmosphère, mais la note sur ses travaux de 1929 met en avant la diffusion multiple des rayons au sein d’une atmosphère pure.
Ces découpages lui permettent de réaliser une étude plus fine de la polarisation de Jupiter, et ainsi de remarquer que sa polarisation n’est équivalente à aucune de celles des autres planètes.
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