Né le 27 février 1897 à Paris, Bernard Lyot développe dès son plus jeune âge de grandes qualités manuelles qui feront de cet enfant curieux un expérimentateur hors norme. Son goût pour l’astronomie se manifeste très tôt et à seize ans, il établit au-dessus de la maison familiale de Paris un petit observatoire ; cependant sous la pression familiale il s’oriente vers l’École Supérieure d’Électricité dont il sortira major en 1917. C’est le lieu de sa rencontre avec Alfred Perot qui lui propose de devenir préparateur de ses expériences dans le cadre des cours de physique qu'il donne à l’École Polytechnique.

 

Durant la première guerre mondiale, les connaissances scientifiques doivent être mises à disposition de la Défense nationale et cette période est propice au génie de Bernard Lyot qui développe en 1917 les procédés originaux de radionavigation, désormais incontournables pour la marine et l’aviation.

En 1920, Alfred Perot, qui était également astronome-physicien attaché à l’Observatoire de Meudon, recommande Bernard Lyot auprès d’Henri Deslandres, directeur de l’Observatoire, pour un poste d’assistant astronome. N’ayant pas encore toutes les qualifications requises, Lyot est admis comme astronome amateur avec la permission d’utiliser les instruments de l’observatoire ; il prépare alors les diplômes universitaires nécessaires à l’obtention de ce poste, qu’il obtiendra en 1925.
 
 
Dans le même temps, les instruments mis à sa disposition lui permettent de débuter sa carrière par une étude sur un sujet novateur : l’analyse polarimétrique comparée des surfaces planétaires et des matériaux terrestres. Cette recherche deviendra le sujet de sa thèse, présentée le 18 juin 1929 sous le titre de Recherche sur la polarisation de la lumière des planètes et de quelques substances terrestres. Docteur ès sciences physiques, il est nommé astronome en 1930.

Lyot n’aurait pu mener sa thèse sans son inventivité remarquable. Grâce à elle il conçoit un instrument fondamental pour l’astronomie : le polarimètre visuel à franges, un outil dix fois plus sensible que les instruments préexistants, qui lui permet de détecter et mesurer la polarisation très faible des planètes.
Lorsqu’en 1928 Charles Fabry attire son attention sur le fait que la lumière de la couronne solaire est polarisée, il trouve une nouvelle application à sa création : l’étude de la couronne solaire en dehors des éclipses.

Ce projet est d’autant plus audacieux qu’une vingtaine d’astronomes y ont travaillé en vain depuis 1878 ; pourtant Bernard Lyot trouvera en moins de deux ans la solution au problème : avec le prototype de son « coronographe », il réalise en 1930 ses premières observations de la couronne solaire à l’occasion d’une mission d’observation de la polarisation de la planète Mercure à l’Observatoire de montagne du Pic du Midi.
Avec ce prototype, constitué de son polarimètre et doté d’une optique très particulière, il détecte un nombre remarquable de protubérances solaires, ainsi qu’une polarisation de la lumière autour du disque solaire , caractéristique de la couronne solaire. Avec un spectroscope, il décèle deux raies spectrales émises par la couronne. Il tente même des clichés directs de la couronne solaire.
 

Sur ce même principe, il construit à Paris en 1931 le premier vrai coronographe et l’achemine jusqu’au Pic-du-Midi afin d’établir des photographies de bien meilleure qualité. Il sera suivi d’un instrument de plus grande ouverture qui y fonctionnera durant 40 ans. Poursuivant ses travaux, il travaille à l’élaboration d’un « filtre monochromatique polarisant » très sélectif, dispositif d’une grande ingéniosité qui aboutira en 1939, à la première cinématographie monochromatique de bonne qualité de la couronne.

 


Montée du coronographe au Pic du Midi, val d'Arize, 5 juin 1936

Ayant résolu le problème de l’observation de la couronne solaire en dehors des éclipses, Lyot désire se soustraire à la condition drastique de l’observation en haute altitude, sous ciel très pur - comme à l’Observatoire du Pic-du-Midi. Exploitant le caractère sélectif de son filtre monochromatique, il élabore un appareillage permettant d’étudier la couronne solaire directement, sans coronographe et sous un ciel ordinaire comme celui des plaines : le « coronomètre photoélectrique ».
Ce nouvel obstacle franchi, Lyot entreprend désormais de détecter la couronne non pas seulement autour du Soleil mais sur le disque solaire lui-même .

Il est certain que son génie serait venu à bout de ce pari, il confiait d’ailleurs à André Danjon en 1951 : « Je connais toutes les difficultés à vaincre ; j’en ai surmonté plusieurs, je compte bien venir à bout des autres, mais pour cela il me faudra dix ans de travail » ; malheureusement il décède le 2 avril 1952 au retour d’une mission d’observation d’éclipse à Khartoum - Egypte.

 

Bernard Lyot à Khartoum

Mondialement reconnu pour ses apports à l’astronomie, Bernard Lyot a reçu de son vivant de nombreuses reconnaissances de ses pairs : en 1931 et en 1932 il se voit attribué respectivement les prix Ancel Janssen -de la Société Française de Physique et de la Société Astronomique de France- ; élu membre de l’Académie des sciences à 42 ans, il reçoit la même année la Grande médaille d’or de la Royal Astronomical Society de Londres. En 1941, The Franklin Institute lui décerne la médaille Haward N. Potts et cinq années plus tard l’Astronomical Society of the Pacific lui remet la Médaille d’or Catherine Wolf Bruce pour couronner l’ensemble de ses travaux.